Le Rocher de la Justice ou les pendus d’Angulis

Article Les Angles

Angulis est l’ancien nom des Angles (Gard). Au Moyen-âge,le Rocher de la Justice (appelé aussi Hauteur de la Justice), ainsi nommé en souvenir des fourches patibulaires érigées à son sommet, se trouve sur le territoire des Angles, village appartenant à la France.

Le Rocher de la Justice ou les pendus d’Angulis

Angulis est l’ancien nom des Angles (Gard). Au Moyen-âge,le Rocher de la Justice (appelé aussi Hauteur de la Justice), ainsi nommé en souvenir des fourches patibulaires érigées à son sommet, se trouve sur le territoire des Angles, village appartenant à la France.

Rocher de la Justice

Il est situé sur la commune des Angles, en bordure de la limite méridionale de Villeneuve les Avignon, à 100 m en aval du pont dit du Royaume, prolongement du pont Daladier. Sa falaise surplombe la route d’Aramonet le Rhône d’une vingtaine de mètres.De ce lieu, la vue est splendide sur la tour Philippe le Bel, le fleuve et ses ponts, Avignon et son Palais et plus loin sur le Ventoux, le Luberon et les Alpilles.

A son sommet serpentent les rues de la Justice et du Rocher.

Les fourches patibulaires

Selon Diderot, les fourches patibulaires remontent au temps des Romains. Après avoir dépouillé le corps de tous ses habits, on fait passer la tête du condamné dans une fourche ; son corps est attaché au manche. Puis il est battu à mort.

Elles apparaissent, dans l’histoire de France, au XIIème siècle.Elles ont une très grand charge symbolique ; celui qui porte atteinte à la justice royale et donc s’approprie une parcelle du pouvoir souverain est un potentiel condamné.

Les fourches sont là pour rappeler le pouvoir judiciaire et l’ordre, pour montrer une justice visible et exhiber le crime vaincu. Elles sont là pour servir d’exemple et donner la terreur aux méchants. Elles sont plutôt dissuasives.

La pendaison incarne l’exclusion, le rejet, le retranchement du supplicié de la communauté. La déchéance du traître et son infamie s’impriment dans sa dépouille exposée.Le supplicié est privé d’une mort digne. La pendaison est souvent la condamnation des criminels de droit commun (crime de sang et vol) mais aussi des traitres.Par sa nudité partielle, le condamné est dépouillé de son identité et de ses attributs sociaux.

C’est donc un lieu d’exécution, d’exposition et souvent d’inhumation des corps.

On pense aussi que l’âme du prisonnier reste prisonnière du corps privé de tout contact avec la terre au moment de la mort par pendaison (punition divine en rapport avec une survivance des superstitions romaines).

Les gibets deviennent autels patriotiques à la Révolution.

Le plus célèbres des gibets est celui de Montfaucon, près de Paris.

Enluminure du gibet de Montfaucon. Jean Fouquet (vers 1460)

Qu’en est-il à Angulis ?

Il est habituel que les gibets soient hors des murailles d’enceinte des villes car les morts suspendus ne peuvent côtoyer le monde des vivants.Ils sont souvent situés sur un sommet pour être bien vus. C’est le cas pour les communes de Villeneuve, Angelis et Pujaut qui utilisent les fourches. Une petite chapelle du nom de Saint Martin de la Balme jouxte le Rocher ; elle n’existe plus.

A Avignon, les gibets sont sur la place du Palais ou aux portes des remparts, notamment à côté de la porte du Rhône, sur les actuelles allées de l’Oulle. Mais le grand gibet d’Avignonest situé à l’ouest de Villeneuve les Avignon(territoirepapal)au lieu-dit « le Montals » ; il s’agit peut-être du quartieractuellement appelé Belle Croix où trônait autrefois une croix sur l’ancien chemin de Compostelle en 1433, ironie de l’histoire?). Il est près d’une source où se trouve un ensemble architectural (entre l’actuel chemin de Monteau et la tour Philippe le Bel)appartenant aux cardinaux qui fuient les nuisances d'Avignon, qualifiée alors par le poète Pétrarque de « plus infecte et plus puante des villes de la Terre ».Vers 1342, le pape clément VI et ses cardinaux,incommodés par la puanteur des corps en décompositionet l’horreur de la vue des cadavres (jusqu’à 30, dit un témoin), décident de transférer le gibet sur le Rocher de la Justice, situé en France. En conflit avec le roi de France, le pape revendique la rive droite du fleuve qui correspondant à son lit, quand il déborde. Il y envoie les condamnés ; la justice d’Avignon est prompte et sévère.

Carte gravée parBraun et Hogenberg. 1575

Décrit par Nicolas Dipre en 1504, le gibet royal est constitué de 3 potences, visibles d’Avignon.Selon le droit féodal, le nombre de piliers des fourches varient en fonction de la qualité du seigneur, haut justicier. Il est construit en bois (certains sont des piliers de pierre reliés par une traverse de bois). Il est, si possible, situé près d’un chemin fréquenté; ici, chemin d’Aramon et celui de Nîmes (le pont sur le Rhône est le seul passage entre Lyon et la Méditerranée, entre la France et le territoire papal).

L’exécution est vécu comme un spectacle voire un divertissement. Seuls les hommes sont attachés aux fourches et, par décence, exceptionnellement, les femmes. Les condamnés sont pendus vivants ou déjà morts et exposés entiers ou démembrés. Les corps pourrissent, soumis aux outrages du temps et de la nature et mangés par les corbeaux. Ainsi, on cite le cas d’assassins de 2 moines de l’abbaye de Saint André et plusieurs malfaiteurs condamnés par les juges municipaux restés suspendus longtemps.

Parfois on accroche un animal responsable de la mort d’un homme (ex : un cochon).

Autres utilisations

  • Préhistoire : sur le Rocher, surveillant le fleuve, sont trouvés des haches, des céramiques, un nucléus (bloc de pierre débité pour produire des éclats ou des lames) témoins de la présence de l’homme au néolithique.
  • Hannibal : en 218 avant JC, venant d’Espagne, l’itinéraire de sa remontée vers les Alpes pour atteindre l’Italie semble montrer que la traversée du Rhône s’est faite entre le Rocher de la Justice et Villeneuve.
  • Romains : une voie secondaire de la via Domitia allant de Nîmes au Rhône passe à l’est du Rocher.
  • Napoléon Bonaparte : en août 1793, la légende dit qu’il se trouve sur le Rocher, à coté de 2 canons qui vont tirer 2 boulets sur Avignon pour déloger une armée marseillaise de fédérés.
  • Félibres : les poètes de la langue provençale, dont Théodore Aubanel et Frédéric Mistral, se retrouvent régulièrement à l’auberge des Chênes Verts, sur le bord du Rhône et dans la villa du Chêne Vert situées à proximité du Rocher pour débattre et faire la fête.
  • 2éme guerre mondiale : en juin 1944, les allemands installent une batterie antiaérienne sur le Rocher espérant éviter la destruction des ponts par l’aviation alliée.
  • Tunnel : depuis les années le Rocher est traversé d’est en ouest par un tunnel pour une voie ferrée destinée au fret
  • Ancienne tuilerie : elle se trouve au pied du Rocher, rue du chêne vert.

Sources

http://www.abbaye-saint-hilaire-vaucluse.com/Guide_d%27Avignon.pdf

Lachezleswatts.com

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